Elle me l’a dit… Oui, elle me l’avait dit.

Qu’hier elle allait mourir et qu’aujourd’hui elle serait vivante.

Elle était déjà si loin, si distante, si triste et pourtant si joyeuse.

Pourquoi n’ai-je rien vu ? Pourquoi était-elle si distante ?

Pourquoi souriait-elle tout le temps si son cœur lui faisait tant de mal ?

Et aujourd’hui elle est morte !

Dans son esprit la vie ne valait rien, l’amour ne l’aidait pas, l’humain l’horrifiait, le monde la terrorisait… Elle n’était pas comme nous, ils n’arrêtaient pas de dire qu’elle était folle.

Qu’on ne savait plus la raisonner.

Elle critiquait toujours la façon dont nous vivions, elle criait toujours que le monde devait changer.

Avait-elle tord ? Après tout, était-elle vraiment folle ?

Elle rêvait d’un monde parfait, elle créait un univers utopique.

Un univers qu’elle adorait.

Son œuvre d’art, un tableau qu’elle avait peint représentait son univers.

Cette œuvre qui l’aura transformée. Ce fameux tableau qu’elle peignit ce samedi là…

Ruby lui avait parlé d’un cours de dessin à Emerston.

Son premier jour là-bas la rendit folle… folle amoureuse de ce jeune prof.

Cet homme était émerveillé par les couleurs de ses dessins, de ses croquis.

Un homme qui lui fit connaitre son premier coup de foudre.

Un homme qui la faisait tout simplement vivre.

Elle ne ratait aucun cours.

Le premier jour, elle ne fit que le regarder, tellement obsédée par lui, elle essaya de le dessiner, sous tous les angles. Mais, elle désespérait, elle était incapable de reproduire les si beaux traits de son visage, incapable de faire ressortir la douceur de son regard, incapable de donner la vie à cette peinture.

A chaque heure de cours, elle s’appliquait. Son prof lui demandait pourquoi elle se consacrait tellement à cet unique tableau.

Elle lui répondait qu’il n’était pas parfait, qu’il ne vivait pas.

Il lui répétait qu’une peinture n’est qu’un bout de papier sur lequel quelques pinceaux dansaient.

Elle, elle s’évadait dans ses dessins, elle vivait à travers eux.

Et cet homme, elle le voulait rien que pour elle.

Il suffisait de trouver le petit détail manquant.

Un jour, chez elle, elle essaya à nouveau. Elle prit ses couleurs et une feuille blanche.

Le premier portrait ne la satisfaisait pas, ni le second, ni le nième…

C’est à ce moment-là qu’elle eu une idée. Elle cueilli une rose, détacha les pétales du cœur et prit celui-ci qu’elle mélangea avec l’eau qu’elle utilisait.

A chaque mouvement de pinceau, son tableau prenait vie.

Elle réussit à reproduire le regard, aussi doux qu’en réalité, de son prof.

Elle l’aimait, elle voulait le voir à chaque instant.

Elle n’allait plus en cours, elle l’avait réussi, elle l’avait rien que pour elle.

Plus tard, elle apprit par Ruby que les cours avaient cessé car le prof était à l’hôpital. Une histoire de coma…

Cette annonce ne la toucha même pas, ses sentiments restaient fidèles à son tableau.

Si bien qu’elle décida de reproduire son expérience. Elle prépara son matériel et sa rose.

Elle avait un miroir face à elle. Elle se peignait. À chaque trait de couleur son âme se libérait.

Quand elle mit la dernière couleur, son corps s’effondra.

Elle se voyait tomber, elle se voyait morte.

Car depuis ce jour, son corps était endormi, dans le coma.

Quant à son âme, elle étincelait dans ce tableau. Elle vivait !

La Rose

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